Philippe Labat est ingénieur consultant pétrolier et signataire de la tribune pour mobiliser la société face au pic pétrolier.
Terra eco : Nous arrivons au terme de la campagne. Que regrettez-vous ?
Je regrette que l’on n’ait pratiquement pas parlé d’énergie, ou en tout cas pas sur une vision de long terme. Par exemple, le prix de l’essence a battu des records chaque semaine pendant la campagne. Les candidats ont donc parlé des prix à la pompe, mais pour proposer le plus souvent des solutions de court terme comme le plafonnement des prix ou l’utilisation de nos réserves stratégiques. Aucun d’eux n’a évoqué les raisons qui expliquent cette hausse, notamment le pic pétrolier, et qui montrent que cela va continuer à augmenter. Nous sommes sur le Titanic, l’iceberg arrive, et les candidats ne le voient pas.
Pensez-vous à l’inverse qu’il y a quelque chose à sauver dans cette campagne ?
Je note du changement dans les discours, même si les dirigeants refusent encore d’en tirer les conséquences. Hier soir encore (lundi 16 avril, ndlr), dans l’émission Mots croisés j’ai entendu Jean-Marc Ayrault (PS) – qui a montré avec le dossier de l’aéroport de Nantes qu’il n’était pas un ardent écologiste – évoquer la finitude de nos ressources. J’ai l’impression que cette idée s’impose un peu partout. Je note par ailleurs que notre tribune pour mobiliser la société face au pic pétrolier a été signée par des personnes venant de la droite comme de la gauche. Je suis satisfait de voir que cette question dépasse les clivages politiques.Quel est à votre sens le ou les défis urgents du prochain quinquennat ?
Les dirigeants doivent impérativement faire preuve de pédagogie sur les questions énergétiques. C’est très difficile par exemple de se rendre compte de ce que représentent les 89 millions de barils de pétrole qui sont produits par jour dans le monde et qu’il faudra remplacer. Pour faciliter cette prise de conscience, un seul grand débat sur l’énergie ne suffira pas. Ce n’est pas à moi mais aux dirigeants d’apporter des solutions, en tout cas cela commence par cesser de proposer des solutions de court-terme, qui donnent de mauvais signaux aux citoyens.Retrouvez les interviews des autres experts :
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