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La monnaie...(Les Economistes atterrés)
Coll. Points Economie, Seuil, 2018, 236 p., 8,30 €
La monnaie joue un rôle clé dans nos sociétés. A côté de l’absence de réflexion sur le sujet de l’économie dominante, des travaux existent qui permettent de comprendre sa nature, son rôle et comment elle peut être source de développement et de crises. Ces travaux sont nombreux et souvent complexes, il manquait une présentation synthétique et plus abordable de ces idées : c’est maintenant chose faite grâce à ce petit livre.
Comme l’indique le sous-titre, la monnaie est un enjeu politique, chacun des chapitres en est une illustration. Signe de lien social, la monnaie est également un instrument de pouvoir dans la société. Son acceptation repose sur la fameuse « confiance » dont les différentes dimensions sont explicitées clairement. Le rôle des banques dans la création monétaire est ensuite expliqué et le poids que jouent les besoins de crédit de l’économie dans sa détermination (avec une explication des notions de multiplicateur monétaire et de diviseur de crédits).
Le rôle essentiel du crédit pour développer des phases d’innovation et de prospérité est abordé mais les auteurs ont préféré privilégier l’explication des mécanismes de dérapages possibles des excès de crédit : surendettement, suraccumulation, inflation, déflation. La politique monétaire est là pour éviter ce genre de dérapages. Les principes d’action en sont démontrés, sans oublier bien sûr le récent quantitative easing, l’achat de titres de dettes par les banques centrales. Les liens, ou plutôt les contradictions, avec les politiques visant la stabilité financière sont mis en avant par des auteurs qui surveillent les excès de dette comme le lait sur le feu.
Un chapitre est consacré aux banques et à leur régulation. On comprend combien elles sont des acteurs importants des marchés financiers, trop aux yeux des auteurs qui les présentent comme délaissant trop ce pourquoi elles sont utiles, financer l’économie et gérer les risques. Les politiques de régulation bancaire ne trouvent pas grâce à leurs yeux, laissant trop de latitude à l’autorégulation des banques et aux possibilités de contournement. Des pistes alternatives sont proposées passant notamment par la séparation des activités des banques entre banque de détail et banque de marché ou bien par un retour à la sélection du crédit. Enfin, un dernier chapitre est consacré au système monétaire international, à son rôle et à la « guerre des monnaies », les batailles de dévaluations compétitives.
Le livre se veut un manuel critique d’économie monétaire et il y réussit. C’est véritablement un manuel, marchant sur deux jambes, mariant l’explicitation des mécanismes à connaître et la confrontation des théories en présence. Critique, il l’est assurément : de l’indigence de l’approche économique dominante sur le sujet mais aussi des politiques publiques qui touchent à la monnaie. On n’est pas obligé de suivre les auteurs dans toutes leurs analyses, quelques éléments empiriques supplémentaires n’auraient pas fait de mal de même que quelques développements sur les aspects positifs de la monnaie, du crédit, des banques et des marchés financiers. Mais il faut apprécier à sa juste valeur cet abrégé des approches de la monnaie, bien public aux mains d’acteurs privés dont il faut assurer qu’il est au service de tous.. Les Économistes atterrés
Ils s'opposent au diktat de l'économie néolibérale à l'œuvre aujourd'hui et éclairent le débat public sur la possibilité et la nécessité d'autres politiques. Leur-Manifeste publié en 2010 (Les Liens qui libèrent)
a rencontré un grand succès en France et à l'international.
Tags : banque, monnaie, credit, politique, role
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