• Ladi Tchagbatao

    Ladi Tchagbatao, une Togolaise de 49 ans, dirige Assilassimé Solidarité, une institution de microfinance très sociale, tirant son énergie d’épreuves passées qu’elle est parvenue à surmonter  (15/12/14 )                   

    Au Togo, Ladi Tchagbatao est directrice d’Assilassimé Solidarité, une institution de microfinance...
    Au Togo, Ladi Tchagbatao est directrice d’Assilassimé Solidarité, une institution de microfinance...

    Assilassimé / ENTREPRENEURS DU MONDE

    Au Togo, Ladi Tchagbatao est directrice d’Assilassimé Solidarité, une institution de microfinance très sociale, créée en 2011 par l’association Entrepreneurs du monde.

                          Assilassimé / ENTREPRENEURS DU MONDE

    Au Togo, Ladi Tchagbatao est directrice d’Assilassimé Solidarité, une institution de microfinance très sociale, créée en 2011 par l’association Entrepreneurs du monde.

    Quand elle est venue à Paris, début novembre, pour recevoir un des Grands Prix de la finance solidaire qui lui a été décerné par l’association Finansol et le journal Le Monde, Ladi Tchagbatao a eu un choc. Non parce qu’elle venait de prendre l’avion pour la première fois, ni même parce qu’elle découvrait le sol européen. 

    Non, à Paris comme à Lomé, la capitale du Togo où elle vit, Ladi Tchagbatao garde les mêmes réflexes : son regard se tourne invariablement vers les plus démunis. Et c’est la misère de certains sans-abri qui l’a ébranlée. « Je n’imaginais pas voir de personnes vulnérables en France », confie-t-elle.

    Au Togo, Ladi Tchagbatao est directrice d’Assilassimé (« main dans la main » en langue éwé) Solidarité, une institution de microfinance très sociale, créée en 2011 par l’association Entrepreneurs du monde. 

     « Contrairement à beaucoup de nos collègues qui ont une approche commerciale de la microfinance, nous essayons de nous adresser aux populations les plus fragiles, celles qui sont exclues de tous les circuits bancaires existants : mères célibataires, veuves, prostituées, malades du VIH… »  

    L’association propose des formations économiques 

    Pour y parvenir, Assilassimé Solidarité n’hésite pas à rompre les codes du secteur, en ne demandant aucune garantie aux emprunteurs. L’association leur propose également des formations économiques (pour les aider à pérenniser leur activité), mais aussi dans le domaine de la santé (prévention du paludisme, maladies sexuellement transmissibles…) 

    La recette semble couronnée de succès : Assilassimé Solidarité soutient déjà 8 000 bénéficiaires – à 99 % des femmes – mais les retards de paiement ne dépassent pas 3 %. « En aidant ces femmes à démarrer ou développer une petite activité, notre objectif est de leur redonner confiance et de leur faire comprendre qu’elles ont un potentiel caché », explique Ladi Tchagbatao.

    Cette sensibilité aux sorts des plus démunies, elle la porte au plus profond d’elle-même. Elle est née en 1965, à Sokodé, la ­deuxième ville du Togo, dans une famille polygame. « Ma maman a eu six enfants, mon papa, qui était instituteur et receveur des postes, quinze, raconte-t-elle. Chacune des mères de la famille avait l’obligation de ramener quelque chose à la maison pour subvenir aux besoins de tous. Ma maman avait un petit commerce de céréales. Et mes sœurs et moi, on a appris à travailler dès le plus jeune âge. »  

    Ladi Tchagbatao fera de brillantes études

    À 10 ans, elle faisait un peu de commerce de bois. « On extrayait du sable aussi, et quand le tas était suffisamment haut, un camion passait nous l’acheter », se souvient-elle.

    Malgré tout, jamais sa maman n’a perdu de vue l’ambition de voir réussir ses enfants. « Elle me répétait sans cesse : “je veux que tu sois sage-femme pour pouvoir me soigner”, rapporte Ladi Tchagbatao. Alors, elle qui n’a jamais mis les pieds dans une salle de classe, a tout fait pour que je puisse aller à l’école. Une école catholique », précise-t-elle.

    Comme ses frères et sœurs, Ladi Tchagbatao fera de brillantes études. En 1995, elle obtient une maîtrise de gestion à l’université de Lomé, puis travaille quatre ans dans une banque et à la Caisse nationale de Sécurité sociale, avant de se marier. 

    Un divorce à 38 ans

    Son divorce constitue le tournant dans sa vie. « Le début du calvaire, souligne-t-elle. À ce moment-là, je n’avais plus d’emploi et j’ai dû prendre seule en charge mes deux filles. Je suis retourné à Sokodé vivre chez mes parents et j’ai commencé les petits boulots. J’avais 38 ans, ça a été très dur. » 

    Elle intègre le monde de la microfinance peu de temps après, d’abord en tant que bénévole dans une coopérative d’épargne et de crédit. Progressivement, elle fait ses preuves, change de structure et grimpe les échelons. « Je me réfère souvent aux difficultés par lesquelles je suis passée, et me dis que je dois tout entreprendre pour que d’autres femmes ne vivent pas les mêmes choses. Ces épreuves, que j’ai surmontées, sont aujourd’hui encore un moteur pour moi. » 

    SÉVERIN HUSSON  (la-croix.com)

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