• Pour une anthropologie économique (Hugues PUEL)

    Pour une anthropologie économique (Hugues PUEL)

    2014     244 p.     17 €

       Pour une anthropologie économique est un plaidoyer en faveur d'un renouveau de l'enseignement de l'économie politique qui fasse toute sa place à l'histoire, à la société et à l'écologie. L'homme économique n'est pas un homo oeconomicus. Il est complexe et divers : propriétaire, entrepreneur, travailleur, habitant et consommateur. Il n'est pas seulement guidé par la rationalité étroite de son intérêt matériel à court terme. Ses motivations sont plus complexes et plus évolutives, car elles s'enracinent dans des implications dans la société environnante. L'homme économique s'inscrit aussi dans une histoire longue, qui aujourd'hui est celle d'une délicate transition démographique, énergétique et climatique qui engage l'avenir de notre humanité..

      Après des études de droit, de sciences politiques et d'économie à l'Université de Bordeaux, Hugues Puel devient frère dominicain et poursuit des études de philosophie et de théologie en région parisienne, puis à Toulouse. Assistant de recherches à l'Institut de relations industrielles de l'Université de Californie à Berkeley pendant les années 1966-1967, il soutient sa thèse de doctorat d'État sur le chômage aux États-Unis à l'Université d'Aix-Marseille en 1968. Puis il dirige la revue Économie et Humanisme pendant une douzaine d'années. Maître de conférences en économie à l'Université Lyon 2 pendant un quart de siècle, il enseignera occasionnellement dans des universités catholiques, à Lyon, à Washington et à Yaoundé. Au centre d'études Économie et Humanisme, il mène de nombreuses enquêtes socio-économiques en Région Rhône-Alpes, en Afrique de l'Ouest, en Indonésie et en Australie.

      Revue de presse

    Denis Clerc
    Alternatives Economiques n° 337 - juillet 2014
     

      Homo oeconomicus n'est pas seulement une simplification, c'est une caricature. Car l'homme économique peut prendre diverses figures - propriétaire, entrepreneur, travailleur, habitant ou consommateur - et à chaque fois, ses attentes, ses raisonnements et ses décisions diffèrent. Pour en finir avec cette caricature, l'auteur, mobilisant une vaste érudition, propose une intéressante synthèse des raisons pour lesquelles la diversité des rôles et des fonctions remplis par chacun l'empêche d'avoir un comportement "monomaniaque", se réduisant à la maximisation de son intérêt personnel. L'activité humaine est créatrice de rapports sociaux, et pas seulement de relations interindividuelles visant à satisfaire des individus soucieux seulement d'eux-mêmes.

       Social, complexe et divers

      D'abord, les relations sociales ne se réduisent pas à l'échange intéressé : elles incluent aussi de la réciprocité (don/contre-don), comme l'ont montré Alain Caillé, Jacques Godbout ou Paul Ricoeur. Si l'homme n'est jamais totalement désintéressé, il n'est pas davantage toujours maximisateur et rationnel. Ensuite, la monnaie n'est pas seulement un instrument technique, mais aussi un élément central du lien social, comme l'ont analysé André Orléan et Jean-Pierre Dupuy : l'économique sert alors de ciment au politique.

      Par ailleurs, la création de richesses est rarement un acte individuel, presque toujours une oeuvre collective, associant certes les propriétaires de l'outil de production, mais aussi l'ensemble des parties prenantes concernées par l'activité économique. Or, dans notre système économique, le pouvoir économique est détenu par les seuls propriétaires. Enfin, la prise en compte de la contrainte environnementale est aujourd'hui bien plus déterminante pour l'avenir de l'homme que la contrainte économique issue de la limitation des moyens disponibles. Bref, l'économique contribue à construire des communautés humaines et pas seulement à calculer des utilités individuelles.

      Le libéralisme économique, confiant sa régulation au mécanisme des prix et au désir de richesse, fragilise l'homme autant que la société, parce qu'il ignore la complexité de celle-ci, mais aussi les formes de socialité de celui-là. Stimulant intellectuellement, ce livre, fidèle à son titre, pose les jalons de ce que pourrait être une anthropologie prenant en compte l'économique, mais ne lui laissant pas toute la place. Regrettons seulement qu'il ne soit pas toujours facile à lire, l'auteur s'autorisant des raccourcis et postulant un peu vite que le lecteur dispose du même bagage de connaissances que lui.


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