Sur un tableau de bataille, la neige produit un effet fantastique. L'inquiétude de Valérie Pécresse est légitime. Dans l'histoire, la neige ne s'est pas contentée de servir la guerre, elle a porté le communisme. Si la révolution d'Octobre s'était produite sous un climat moyen, avec un ciel variable, des averses, un petit crachin, elle n'aurait pas eu plus d'importance qu'un renversement de majorité au Palais-Bourbon. Les rêves révolutionnaires sont toujours associés aux climats extrêmes, ils ont besoin des crues du fleuve Jaune, des moussons de l'Asie ou de la chaleur écrasante d'une sierra. L'effet le plus durable a été produit par les neiges de Russie. Enlevez les flocons de la photo, et Lénine n'est plus qu'un petit bonhomme sans charme, retirez le chasse-neige de la locomotive, et le train blindé de Trotski devient un tortillard de banlieue.
On comprend, dans ces conditions, qu'à la moindre chute de neige Valérie Pécresse imagine le pire. Tombe la neige, impossible manège, Adamo trempe dans ce complot bolchevique. Les trains de banlieue sont en retard, Mélenchon est en embuscade, près des glaces, sur l'ancienne voie du canal Saint-Denis, avec son convoi rouge orné de fresques futuristes.
Pouvait-on éviter ça ? Le Parisien n'hésite pas à poser la question, sur fond d'automobiles patinant sur une artère de la capitale. On peut saler, sabler, de manière à rendre les chaussées à peu près praticables, mais pour «éviter ça», il faudrait interdire que la neige tombe. Est-ce ainsi congère, demande Valérie Pécresse ? Sous une gauche molle et froide, n'ayant d'autre objectif que la fonte des déficits, l'hiver se permet tous les excès.